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Actes du 3e Colloque de l’IRAFPA – Poster 04

Actes du 3e Colloque International de Recherche et Action sur l’Intégrité Académique
Défis et incertitudes de l’intégrité académique à l’ère de l’intelligence artificielle”
20-22 juin 2024, Université de Coimbra (Portugal), sous la direction de Michelle Bergadaà & Paulo Peixoto

Le défi de l’instruction des cas de plagiat par les instances disciplinaires académiques
Jean-Yves Puyo, Professeur des universités, UPPA (France)
Jacques Py, Professeur de psychologie sociale, Université de Toulouse (France)

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ORCID : Jean-Yves Puyo 0000-0002-8610-0859 ; Jacques Py 0000-0002-8595-5855

DOI : https://doi.org/10.56240/fdfpos04 (provisoire)

 

Jean-Yves Puyo et Jacques Py ont exercé de longues années (respectivement près de dix ans et quatre ans) et jusqu’à très récemment la fonction de magistrat d’appel des décisions disciplinaires des universités françaises. Ils ont jugé plus de cent affaires disciplinaires. L’objet de cette proposition de communication vise à réaliser une analyse des affaires de plagiat ayant donné lieu à un recours auprès de la commission statuant en matière disciplinaire du CNESER, compétente pour le domaine de l’enseignement supérieur public français (hors domaine hospitalier).

Le droit public français « souffre » de l’absence de définition forte du plagiat, argument fréquemment mis en avant par les avocats de la défense qui se retranchent alors le plus souvent derrière les règles fixées par le code de la propriété intellectuelle. Toutefois, dans le domaine qui nous intéresse (l’enseignement supérieur et la recherche), l’activité plagiaire donne évidemment lieu à sanctions disciplinaires. Ce plagiat recouvre deux formes : le plagiat textuel et le plagiat d’idées. La première, qui consiste en l’appropriation de l’œuvre d’autrui, est assez aisée à mettre en évidence. Pourtant, c’est la seconde forme, le plagiat d’idées qui constitue à notre sens l’atteinte la plus problématique à l’intégrité scientifique, portant une atteinte grave à l’identité professionnelle du chercheur plagié. Aussi, si « les idées sont libres de droit » pour les juridictions pénales et civiles, le vol d’idées est constitutif de lourdes sanctions par la juridiction disciplinaire. Toutefois, ce même plagiat d’idées demeure très difficile à mettre en évidence et les juges relevant « du disciplinaire », tant à l’échelon local (les établissements) qu’au niveau de l’instance nationale (la commission dite du CNESER disciplinaire) ne disposent pas des moyens pour traiter correctement les cas rencontrés, se contentant bien souvent d’analyser les recouvrements textuels.

Le plagiat constitue l’une des principales atteintes à l’intégrité scientifique. C’est aussi certainement l’une des plus étudiées (cf., par exemple, Bergadaà & Peixoto, 2021). Pourtant, si le point de vue des victimes a souvent été mis en avant, la perspective adoptée par les juges amenés à traiter les affaires de plagiat reste relativement méconnue. Or, ce sont les magistrats qui, in fine, sont décisionnaires. Aussi, en premier lieu, sur la base des nombreuses affaires que les auteurs ont instruites et/ou jugées entre 2015 et 2023 touchant tant les enseignants-chercheurs que les étudiants, il s’agira pour nous de quantifier le phénomène : que représentent les affaires de plagiat « tous types » par rapport à l’ensemble des affaires disciplinaires ? Et en second lieu, il s’agira d’apporter un éclairage portant sur les conséquences des affaires de plagiat au plan juridique (complémentarité des juridictions disciplinaires et pénales et civiles), organisationnel (comment mettre en évidence le plagiat académique ? comment rédiger une saisine pour ce genre de cas ?), et enfin, humain (que retire la victime d’une sanction disciplinaire du plagiaire ? quelle leçon en retire le déféré ?)

Nous commencerons donc par situer les cas de plagiats parmi l’ensemble des affaires disciplinaires, et soulignerons la faible proportion de ces cas d’atteinte à l’intégrité académique, comme l’a déjà souligné Roux-Steinkuehler (2021). Ensuite, nous présenterons ensuite une série d’affaires jugées par le « CNESER disciplinaire » en mettant en perspective les arguments présentés par l’accusation, d’une part, et par la défense, d’autre part. Enfin, analyserons la manière dont les juges ont eux-mêmes instruits ces cas et pris une décision de sanction, construisant au fil des affaires une réelle jurisprudence venant en appuie du code de l’éducation français, à ce jour encore bien déficient quant à ces questions de plagiat.

 

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En vue de renforcer les “Sciences de l’intégrité” de façon participative, l’IRAFPA a fondé son propre «Pôle Publications de l’IRAFPA» en mars 2022.
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